Spectacles historiques : la culture au service des réactionnaires ?

En septembre 2024, Rue89Lyon reçoit un mail presse pour la promotion du spectacle “Raconte-moi la France”. A grands renforts de communication, ce mail de la région Auvergne Rhône-Alpes qualifie cet événement de “grandiose”, “incroyable”, voire même d’“essentiel pour la culture”.

Il y a eu d’énormes coupes budgétaires pour les institutions culturelles de la région. L’argument avancé était une redistribution, couper aux villes pour rendre aux campagnes. En réalité, ce sont aussi des structures de villages qui se font sucrer des subventions.

Dans ce spectacle qui souhaite “mettre la France au cœur”, on retrouve l’idée d’un pays qui aurait des racines strictement gauloises, alors que les Français·es sont issu·es d’une histoire complexe et de reconfigurations au fil des guerres. 

Ce spectacle prône un roman national, une histoire de France qui est linéaire, qui a une finalité et un but, pour mettre en avant un peuple à l’histoire millénaire qui évolue dans le temps de façon linéaire. Cette conception est absurde pour tous les historiens, ne correspond à aucun standard scientifique.

Laurent Wauquiez a assumé qu’il voulait se servir de ce spectacle comme d’un outil d’éducation. Ce qu’il faut interroger, c’est que derrière la promotion régionale d’un tel événement, il y a aussi beaucoup d’argent public versé pour ce spectacle. La région a notamment payé pour que son logo apparaisse sur les supports de communication du spectacle, la contrepartie étant que la première du spectacle ait lieu à Clermont, puis qu’il se déplace à la LDLC Arena à Lyon. 

Ce spectacle n’est que l’une des manifestations des nombreuses fêtes (du Puy du Fou aux plus petites fêtes de village) aux allures souverainistes, de plus en plus financées par des personnalités qui le sont tout autant. C’est le cas de Pierre Édouard Stérin, qui met son argent au profit d’un projet d’extrême droite, comme lors du spectacle du Sermon du Vigneron, dans le Beaujolais. Rue89Lyon s’est rendu au spectacle, lequel décrit de manière presque caricaturale une vision féodale de la France : celle du seigneur protecteur à qui l’on doit le respect. A l’inverse, le passage sur la révolution est presque effacé, et se limite à exposer en quoi les moyens des révolutionnaires, qui ont tué la noblesse, sont critiquables.

Dès qu’on critique le Puy du fou, on peut être taxé d’anti France. En réalité, c’est justement être pro France que de critiquer le Puy du Fou et sa vision de l’histoire.

Une émission Radio Anthropocène présentée par Pierre Lemerle, de Rue89Lyon.

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